Irisfootball.com : La RDC alignera pour la première fois deux équipes à la phase des groupes de la Ligue des champions de la CAF, en l’occurrence l’AS V Club et le TP Mazembe. C’est aussi une première expérience pour V Club d’accéder à cette étape de la nouvelle compétition. Quelle est votre appréciation ?
Pierre-Célestin Kabala Mwana Mbuyi : Une première par rapport à la Ligue des champions de la CAF. C’est un honneur, une fierté pour la RDC. C’est quelque chose que nous devons vivement saluer. Mon analyse est que c’est le résultat d’un travail de fond. C’est le résultat d’une bonne vision de la gestion sportive du temps moderne. Voilà le résultat du divorce d’avec la médiocrité, l’amateurisme. AS V Club comme TP Mazembe ont investi dans les structures, dans les infrastructures, dans l’assistance économique et dans le professionnalisme que nous avons toujours prônés. Il n’y a plus de place pour l’improvisation où il fallait changer d’entraineur à tout moment, avoir des entraineurs qui n’avaient aucune base scientifique et technique pour compter sur le hasard, compter sur les charlatans. Fini cette histoire. Il faut maintenant avoir des joueurs professionnels, les rémunérer suffisamment et avoir des entraineurs qualifiés. Certes, il y a encore du chemin à faire étant donné que cette étape la plus difficile n’a pas encore débuté.
Quelles sont les chances que vous accordez à AS V Club et TP Mazembe qui représentent non seulement la RDC dans cette des groupes de la Ligue des champions e la CAF, mais aussi toute l’Afrique Sub-saharienne ?
Les chances dépendent du sérieux, de la conscience et de la discipline qu’ils mettront. Elles dépendent également du tirage au sort qui pointe à l’horizon d’ici fin du mois. Nous devons aussi prier pour que V Club et Mazembe ne se retrouvent pas dans le même groupe. Si les deux se rencontrent, nous aurons une chance de moins de se retrouver à la prochaine étape de la compétition. Mais quand l’un ou l’autre fait partie d’un groupe différent, en ce moment elles auront beaucoup des chances de se qualifier et atteindre le carré d’as mais également de tout perdre en cas de catastrophe. Mais nous avons la chance de présenter un club en final de cette édition. La seule condition pour en arriver, c’est la préparation. Cette préparation dépend du championnat national, lequel, malheureusement, souffre d’un regard négatif de la part des sportifs quant à son organisation et son déroulement.
Atteindre la phase des groupes de cette compétition la plus prestigieuse du continent africain est une première pour l’AS V Club. Sera-t-elle capable de se mesurer aux habitués de la ligue des champions de la CAF en l’occurrence Zamalek, SC Sfaxien, l’Espérance de Tunis, et autres ?
Je peux répondre par l’affirmative tout comme par la négative. Je commence par la négative, peut-être parce qu’il y a beaucoup des jeunes footballeurs au sein de V Club de même que chez TP Mazembe qui a quand même renouvelé son effectif. Je peux dire oui suivant l’adage qui dit ‘‘dix fois, cent fois à l’ouvrage, on fini par avoir du professionnalisme, du métier’’. Ces jeunes gens ont eu le temps de se frotter avec des clubs nantis. Eliminer un club sud-africain n’est pas une mince affaire. Car les Sud-Africains développent un bon football, un football professionnel. Ils ont un football plus huppé. Ils disposent des centres de formation. Ils ont également des athlètes bien rémunérés, qui jouent suffisamment de matches au cours d’une saison. Eliminer un club nigérian, n’est pas également donné. Ces jeune gens ont compris qu’aux âmes bien nées, la valeur n’attend point le nombre d’années. Ils gagnent au fur et à mesure qu’ils évoluent. Ils gagnent en compétitivité et en maturité. Maintenant, ils ont compris qu’ils peuvent. ‘‘Yes we can’’ comme disent les Anglo-Saxons. Ils croient maintenant, ils espèrent et se sont donnés de la confiance qu’ils peuvent encore osez aller le plus loin possible. Maintenant, ils doivent planifier leur programme de préparation. Il faut aussi faire remarquer que parfois les grands champions, quand bien même ils croient en eux-mêmes, ils éprouvent parfois de sérieuses difficultés lorsqu’ils se mesurent aux petits clubs. Ils négligent et vous verrez que le petit qui a mis du temps dans la préparation, du sérieux, arrive à battre celui qui se dit grand. Lorsque vous avez les arguments sur le plan financier, sur le plan structurel et infrastructurel, le reste se joue parfois sur les petites choses. Le reste se joue sur le mental. Ce que doit faire V Club vaut mutatis mutandis pour TP Mazembe.
Tous les clubs qualifiés se préparent d’arrache pied pour affronter la phase des poules avec quiétude. Que préconisez-vous que soit fait au niveau des staffs techniques de TP Mazembe et de l’AS V Club ?
Ce que je constate c’est la faiblesse au niveau de nos attaques. C’est comme si le football congolais a perdu de la puissance. Il faut une puissance. Mais je constate une timide émergence dans V Club. On sent que les jeunes qui sont alignés dans la ligne offensive ont envie de marquer. Nos clubs doivent être des clubs qui défendent et qui attaquent au même moment. Il faut aussi faire le choix des éléments qui s’adaptent à ce système. On doit vite corriger des failles au cours de deux premières étapes à savoir la 16ème et la 8ème de finale. Pour le reste, les comités doivent mettre sur pied des stratégies qui s’accompagnent des moyens financiers nécessaires pour permettre à Mazembe et à V Club de réussir cette étape de la compétition.
Quel regard portez-vous sur le souhait de certains fans de V Club que les deux équipes congolaises tombent dans un même groupe ?
Deux valent mieux qu’un. Si nous avons un seul représentant dans chaque groupe, il y a plus de chance qu’on retrouve un club congolais en finale. Mais ce n’est pas aussi évident que V Club batte Mazembe. Ceux qui réfléchissent de cette manière, passent à coté. Si on nous oppose entre nous, nous aurons moins des chances à se qualifier pour la demie finale. Il faut que les gens réfléchissent dans l’intérêt de la nation et non pour l’intérêt individuel.
Comment jugez-vous l’avenir du football congolais au regard de ce qui se fait sous d’autres cieux ?
Nous sommes sur les pas des clubs maghrébins. Ces clubs pratiquent du football professionnel. Ils mettent beaucoup des moyens pour les permettre d’aller très loin. Ce ne sont pas des petites équipes qui se recherchent. Mais ce sont des forteresses. Lorsque vous-vous rendez en Egypte ou en Tunisie, vous sentez que vous êtes en face des clubs nantis. La plupart de leurs clubs ont des stades, les joueurs bien rémunérés. Ils préfèrent jouer chez eux qu’en Europe. Ils n’envient pas les joueurs qui évoluent au championnat européen. Ils ont des structures bien assises avec des installations sportives et infrastructures modernes. Ils ont des clubs d’âges et des pépinières qui font leur base. C’est ce qui fait la différence chez nous. Maintenant je suis fier de constater que Mazembe est le premier à emboiter le pas à ces gens. Il en est de même petit à petit pour V Club.
Quel rôle croyez-vous les dirigeants sportifs sont appelés à jouer dans l’accompagnement de leurs équipes ?
J’ai toujours dit que les joueurs deviennent des professionnels. Mais très peu des dirigeants comprennent qu’ils sont professionnels à tous les niveaux. A partir du moment où un dirigeant comprend qu’il faut mettre des moyens, recruter des joueurs, créer des centres de formation, avoir un entraineur qualifié avec un contrat bien défini et le payer comme un entraineur de renom.