La Fédération congolaise de football association (FECOFA) sera en assemblée générale et élective à Kindu dans le chef lieu de la province du Maniema. En prévision de ces assises, votre rédaction a réalisé une entrevue avec Pierre-Célestin Kabala Mwana Mbuyi, président de l’Association des journalistes sportifs du Congo (AJSC). Fin connaisseur du football et journaliste émérite qui a fait le tour du monde, Kabala aborde des questions de l’heure avec circonspection. Il évoque également l’élimination de TP Mazembe en Ligue des champions de la CAF. ans quelques jours, la FECOFA va organiser les élections pour élire le nouveau comité exécutif. Quelle est votre réaction par rapport à l’organisation de ces élections ?
Irisfootball.com: Dans quelques jours, la FECOFA va organiser les élections pour élire le nouveau comité exécutif. Quelle est votre réaction par rapport à l’organisation de la tenue de ces élections
Pierre-Célestin Kabala : Ma première réaction est que les choses semblent se faire dans des conditions qui ne répondent pas aux textes légaux et réglementaires. Il semble que les choses soient faites dans la précipitation compte tenu de certaines échéances. On ne peut pas comprendre que brusquement, et dans l’espace d’un mois, on lance le communiqué pour organiser les élections. La saison 2012 s’est terminée dans la confusion. Souvenez-vous du litige AS VClub-Mazembe avec l’affaire des reports de la clôture du championnat, avec les arrêtés ministériels portant dérogation et la FECOFA ne s’est jamais réunie pour faire le bilan. Maintenant, une autre saison a commencé et d’ailleurs, elle a commencé en retard. Nous sommes au mois de mai et on dit qu’on organise l’assemblée générale ordinaire de la saison 211-2012 alors qu’on est déjà en 2013. Ce sont là des anomalies. Ensuite, j’observe dans le chef de la FECOFA cette pratique de faire la rotation par rapport au lieu de la tenue des élections. On déplace la tenue des assemblées générales non gratuitement, mais avec quel objectif. Quand on fait la rotation pour la tenue de l’assemblée générale ordinaire ou l’assemblée générale extraordinaire, ce lieu destiné à recevoir ces assises doit bénéficier d’un investissement. Quelles sont les retombées de la tenue des élections à cet endroit. Est-ce qu’au cours de la clôture de la saison précédente, il était dit que la prochaine assemblée générale devait se tenir au Maniema ? Nous devons améliorer nos pratiques et faire mieux les choses de manière à être accepté par tout le monde. Avec de telles pratiques, lorsqu’on sera appelé à diriger un ministère, le progrès ne pourra pas venir.
Ces élections seront-elles crédibles et dignes ?
Je pense que les responsabilités doivent être partagées. Souvenez-vous que la loi accordait un délai de grâce de 10 mois à toutes les fédérations de se conformer au statut type et se conformer entièrement à la loi sportive. Mais, je constate qu’au ministère des Sports, on a fait de la complaisance vis-à-vis de certaines fédérations qui n’ont jamais retourné leurs statuts adaptés au statut type et qui n’ont pas modifié certaines dispositions de leurs statuts qui sont en contradiction avec la loi. Quand je lis une disposition de la FECOFA, je constate qu’à l’article 1er, on dit que la FECOFA est régie par les présents statuts par les dispositions de la loi n°004 du 20 juillet 2004 portant réglementation des associations sans but lucratif (ASBL) et par la réglementation relative au sport en général et en particulier au football applicable en RDC, non contraire aux statuts de la FIFA et de la CAF. Est-ce que vous pouvez comprendre qu’une disposition légale puisse se conformer aux dispositions réglementaires et statutaires de la fédération. Vous voyez que nous naviguons dans un monde des contradictions gravissimes. Tout le monde sait qu’il y a les hiérarchies des textes dans un pays. Nous avons la Constitution, la loi, les textes particulières réglementaires des associations, le décret-loi, les arrêtés. C’est la même loi 004 à laquelle la FECOFA fait allusion et qui ne peut être en dessous des statuts des fédérations. C’est là où je note qu’il y a complaisance. La loi est générale et on ne l’édicte pas au bon vouloir et aux aspirations de quelques particuliers. L’arrêté ministériel portant délimitation des saisons sportives en RDC a été rendu public le 31 mai 2012. Mais, ce texte dit que l’assemblée générale est convoquée en session ordinaire par le bureau exécutif des fédérations obligatoirement à la fin de chaque saison sportive. Est-ce que la FECOFA l’a respecté. Et avec la dérogation, on est allé jusqu’au mois de novembre. L’article 24 du même texte dispose que l’assemblée générale consacrant la fin de mandat se tient impérativement au siège de la FECOFA. Les élections relatives au renouvellement des mandats doivent faire l’objet de la convocation d’une assemblée générale extraordinaire dont les assises se tiennent obligatoirement au siège de la FECOFA dans les 60 jours. Maintenant, on se pose la question de savoir quand prend fin le mandat de l’actuel comité exécutif. Voyez qu’on ne respecte rien et personne n’a pris la moindre sanction. Il est quasiment difficile au ministère d’en sortir parce que j’ai appris que c’est maintenant que le ministère se réveille et se fait prendre au piège de la FECOFA.
Visiblement, il y a violation systématique des textes. Selon vous, qui est habilité à sanctionner ?
Sans mâcher des mots, nous sommes dans une situation de crise institutionnelle. Cette crise mérite d’être analysée par un mouvement d’ensemble pour sauver le football congolais. Soit que le gouvernement de la République doit prendre le taureau par les cornes et amener les gens à un débat qui puisse aboutir à une petite révolution et porter cette situation à la connaissance des institutions internationales. Il ne faut pas qu’on cherche des têtes des gens à couper, mais que l’on remette la gestion de notre football dans le chemin. Sinon, comme certains pays l’ont fait en y impliquant le parlement étant donné qu’il s’agit des choses qui font référence de la loi constitution.
Selon vous, qu’est-ce qui est toujours à la base de la délocalisation de ces assises?
A travers le monde, il y a le système de rotation des assemblées générales. Les assemblées sont rotatives. Ce n’est pas gratuit. Ils le font parce que les textes le prévoient. Mais chez nous, il y a un cadrage où on vous dit que s’il s’agit de ça, ça ne peut se tenir qu’au siège de la FECOFA. Quand on va dans la contravention, on tombe déjà. En ce moment, on doit être sanctionné par l’autorité habilité. La tenue de l’assemblée générale ne se fait pas en improvisant. C’est comme le commun des mortels disent que c’est pour permettre à d’autres candidats qui voudraient bien postuler au comité exécutif d’avoir la possibilité de prendre l’avion et de suivre parce qu’il faut le dire ouvertement que Bwanandeke a fait les frais de cette stratégie. Lorsque les travaux de la dernière assemblée générale élective de la FECOFA se sont tenus au Katanga, il a payé son titre de voyage pour aller au lieu du rendez-vous. Lorsqu’il est arrivé à l’hôtel où était prévue les élections, on lui a dit qu’on avait déplacé tout le monde. Le temps d’arriver à ce nouvel endroit, il a trouvé que tout était déjà boutiqué. On lui a accordé la parole que juste pour deux ou trois minutes.
Les amoureux du football pensent que le comportement des dirigeants de la FECOFA risque de plonger le football congolais dans un cycle infernal. Partagez-vous cet avis ?
Effectivement. Ça semble se généraliser. Dites-moi quand on dit que pour être membre du comité exécutif de la FECOFA, il faut avoir été membre de ce comité ou alors d’une structure de cette fédération. Aujourd’hui au COC, c’est le même scénario. Dites-moi, quand est-ce que les jeunes millionnaires qui aiment le sport et qui les financent pourront-ils diriger la FECOFA ? Malgré leur puissance économique, leur capacité intellectuelle, on ne les laisse pas l’opportunité pour diriger. Ils ont tout ce qu’il faut, mais quand ils arrivent pour prendre les responsabilités, on va leur dire qu’il faut être d’abord membre quelque part. Cette pratique est contre la démocratie.
Votre lecture en rapport avec l’élimination de Mazembe à l’étape de 8ème de finale de la Ligue des champions de la CAF ?
Mazembe est affaibli par les transferts lesquels n’ont pas été soumis en placement immédiat et bien mesuré. Ce placement n’a pas été pris en compte par une compétition digne de ce nom pour permettre aux nouveaux éléments de s’intégrer dans les stratégies du nouvel entraineur dans l’esprit du football du Tout Puissant Englebert Mazembe. Mazembe ne s’est contenté que des matches amicaux. Un match amical reste un match quel que soit l’enjeu qu’il présente. Mazembe a affronté Orlando Pirates et rappeler vous qu’il a presqu’égale valeur avec Orlando. La différence réside du point de vue de la fraicheur musculaire et des exigences des entraineurs. En plus, il faut savoir que c’est la compétitivité de chaque club qui peut faire la différence. Lamine Ndiaye est en train de rechercher son équipe. Avant, il avait travaillé sur une équipe déjà bien préparée par Diego Garzito. Mazembe n’a pas été préparé par une compétition nationale de valeur élevée. Lors du match retour à son stade de Kamalondo, Mazembe n’a fait que courir derrière la lune. Vous savez, lorsqu’on court derrière son passé, on court avec vitesse et précipitation. On confond vitesse et précipitation. Et c’est ce qui est arrivé à Mazembe. Quand les gens n’ont pas leurs nerfs en place, leurs gestes ne sont pas précis parce qu’ils le font dans la précipitation. C’est ainsi qu’ils ont même manqué deux pénalty. Même le choix d’éléments qu’on devait effectuer parce qu’on tenait à tout prix à gagner, ce choix a été fait dans la précipitation. En ce moment, c’est l’entraineur qui subit des pressions. On lui impose de placer tel joueur. Le choix ne dépend plus en ce moment là de l’entraineur. La vraie valeur du football de Mazembe n’a pas été démontrée ce jour là contre Orlando.
Si vous étiez à la place de Lamine Ndiaye, comment alliez-vous procéder pour permettre à Mazembe de se racheter en Coupe de la CAF ?
Après l’élimination de la Ligue, je crains que Mazembe connaisse une crise. S’il n’y a pas de crise, ce que je peux demander à Lamine Ndiaye, c’est plutôt de préparer l’avenir à travers la LINAFOOT et la coupe de la CAF. Il faut que Lamine Ndiaye puisse relativiser ses ambitions en préparant l’équipe de l’année prochaine. En plus, il ne doit pas s’en tenir aux anciens qui sont là. Maintenant, il doit commencer à préparer une autre génération des footballeurs. Il doit préparer l’équipe de l’année à travers ces compétitions. S’il garde les pions majeurs, ces mêmes pions majeurs n’ont plus la même motivation. La ligue est assortie d’une cagnotte importante. Ces messieurs quand ils vont jouer la coupe de la CAF, ils n’auront plus la même motivation parce qu’à la CAF, la cagnotte n’est pas conséquente. En ce moment, ils joueront pour le plaisir. Et comme ils n’ont plus d’avenir devant eux, ils diront advienne que pourra. Ils vont empêcher aux jeunes de constituer la grande puissance de Mazembe de se préparer pour affronter des compétitions. C’est là où on fait appel et à l’entraineur et aux dirigeants de Mazembe. Ce qui est raté est déjà raté. Maintenant, il faut penser à l’équipe d’avenir.